lundi 3 octobre 2011

Les oubliés de la Shoah : est ce suffisant ? Article rédigé pour Hamodia, août 2008

Notre gouvernement annonçait fin octobre une hausse de l'indemnisation des survivants de la Shoah
Déjà au mois d'août, un premier geste avait été fait en faveur du premier cercle des rescapés : ceux qui avaient survécu aux camps de la mort. Le mois dernier, c'est au deuxième cercle, ceux qui avaient fui pour échapper aux nazis, que se sont adressées les nouvelles mesures. Le premier ministre nous déclarait en présentant ces aides : "L'Etat d'Israël n'a jamais donné à ceux qui ont survécu à la Shoah l'attention et les ressources qu'il a mis dans la culture de la mémoire de ceux qui sont morts dans la Shoah".

Nous ne pouvons que nous féliciter de ce changement d'attitude du gouvernement d'Israël. Il reste, néanmoins, que les nouvelles mesures prisent nous semblent, aux regards de la situation des rescapés et de leurs contributions à la création de l'Etat d'Israël, bien insuffisantes. La première annonce d'une augmentation au début du mois d'août d'une rallonge de 83 shekels par mois et par survivant, a été vécue comme une insulte faite aux 70,000 rescapés des ghettos et des camps de la mort. Sur les 250,000 survivants, y compris ceux qui ont fuient l'Allemagne nazie, c'est aujourd'hui plus d'un quart qui vivent sous le seuil de pauvreté. Et si toutes les pauvretés sont inacceptables, la pensée, que ceux qui ont arboré l'étoile jaune ou porté le pyjama rayé, doivent, sur notre sol retrouvé, choisir entre leurs médicaments ou du pain est intolérable. Et si finalement une aide promis de 1.200 shekels pour ceux qui ne recevaient aucune pension de l'Allemagne ou d'Israël a été fixée, il ne faut pas oublier non plus, que nous parlons de personnes ayant, le plus souvent, passé la barre des 80 ans. Mais les aides accordées ou les déclarations de bonnes intentions nous paraissent bien peu de chose, face aux vrais problèmes qui sont laissés en suspend pour des raisons politiques ou, plus graves, pour des raisons purement mercantiles. 


Le président de l'Agence juive Zeev Bielski déclarait, il y a quelques mois : "Si l'allocation des indemnités aux survivants continue au rythme d'aujourd'hui, alors la plus grande partie des sommes allouées resteront dans les banques américaines après le décès du dernier rescapé". Interrogeons-nous avec lui... alors que 80% de ceux qui sont sortis des ghettos vivent en Israël, pourquoi les critères et les décisions pour allouer les sommes dues aux rescapés restent le fait de quelques individus vivant sur le sol des États-Unis ? Mais sans traverser l'Atlantique, regardons chez nous et demandons ensemble au gouvernement d'Israël, avant que ne soit privatisées toutes les banques israëliennes, que soit réglé le problème, les comptes ouverts par nos frères assassinés en Allemagne nazie et qui soixante ans plus tard, restent irrésolus. Nous parlons pourtant de plus de 2,500 comptes qui ont été ouverts et si une partie de l'argent a été reversée, exigeons avec Madame Ruth Avraham, secrétaire générale de la société pour La restitution des biens aux rescapés et avec la Commission parlementaire de 2004, sous le patronage de Madame la député Colette Avital, que soient restitués non pas 37 millions de shekel mais les 307 millions dus. 

Interrogeons-nous aussi, avec les banques israéliennes, sur la raison pour laquelle les sommes qui arrivent d'Allemagne au début ou au milieu du mois sont reversées aux rescapés seulement à la fin du mois et sans les intérêts. Pourtant, un rapide calcul sur les dix dernières années nous montre que ce sont des dizaines de millions de shekel d'intérêt qui ne sont pas reversés aux ayant-droits. Enfin questionnons-nous, avec le contrôleur de l’État d'Israël, Micha Lindenstrauss : pourquoi faut-il chez nous que 17% des demandes d'aides de rescapés de la Shoah restent sans réponses après 7 ans et que 58% d'entre elles ne sont traitées qu'après plusieurs années ? 

Face à tous les défis d'Israël, ce ne sont pas les négociations avec les palestiniens, la menace syrienne ou la bombe iranienne qui doivent nous effrayer. Dieu, soyons en certain, reste notre meilleur bouclier ! Notre véritable ennemi est en nous, dans notre perte d'humanité face aux plus démunis. N'oublions pas pourtant, que c'est grâce à ses hommes et ses femmes courbés par le temps, que nous sommes debout aujourd'hui sur notre terre, rescapés des camps, qui sortis de l'horreur de l'enfer, ne représentaient plus en 1948 que la moitié des forces qui combattirent pour l'Indépendance de notre pays. 

@ Richard Sitbon

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